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François BIDOU et le Tour de Gironde

 

"Tour de Gironde"

 

 

TdG vue panoramique.jpg

 Cette photographie (merci F. Bidou) illustre parfaitement l'identité du "Tour de Gironde" : sous le soleil de mai, un peloton multicolore serpente entre vignes et coteaux.

  

 

 . « Dis-donc, si… ? »

 

Cela commence à l’automne 1973, au bord d’un terrain de football où joue la Jeunesse Villenavaise (le stade Wangermez), deux pères de famille, anciens coureurs, se retrouvent. Pendant que leurs fils se démènent sur le terrain, ils en viennent naturellement à parler « vélo ». A Villenave d’Ornon, justement, il n’y a pas de club de cyclisme.

Alors, l’idée vient à François Bidou et à Jacky Lafranque d’en créer un. « On recrute deux ou trois copains… » (avec le couple Bresson, René Lapébie est l'un de ces pionniers) et François raconte comment, pour la première course qu’ils ont voulu organiser à Chambery, ils se heurtent au maire de l’époque (V. Mazars), qui ne leur donne pas « l’autorisation municipale ».

Mais, l’organisateur est d’abord un rassembleur : une pétition est lancée, que tous les habitants du quartier signent. Le maire est obligé et, le 23 mai 1974, ont lieu les 8 heures de Villenave.

L’U.S. Villenave « cyclisme » est née. Les statuts adoptés par l’assemblée générale du 23 novmebre 1974 sont déposés à la Préfecture. Une « Ecole de vélo » est ouverte sous la direction de J. Lafranque et J.P. Bresson, qui compte bientôt une trentaine de filles et garçons.

Le club organise ensuite, à deux reprises, le challenge « Jacques Anquetil » qui rassemble plusieurs « écoles de vélo » et s’installe sur le parking du supermarché « Géant Casino », au Pont-de-la-Maye.

L’année 1975 voit l’entrée de l’U.S. Villenave « dans la cour des organisateurs reconnus de la région » avec la mise sur pied du 1er « Tour de la Gironde Sud », le 8 juin.

 

Le « Tour de la Gironde Sud »

 

Certes « rassembleur », François Bidou, cependant, s’avoue « organisateur autodidacte ». Mais, dans la chasse aux sponsors, il est « inspiré », et, surpris aussi. Le directeur du « Géant Casino » qu’il est allé solliciter pour 500 F de l’époque, lui déclare : « votre affaire m’intéresse ! » et lui octroie 5000 F !

L’ « organisateur autodidacte » a eu la sagesse d’aller aussi à la « pêche » aux conseils. Parmi les plus précieux, il y a ceux de J. Lafourcade (un temps, le maire de Saint Pierre d’Aurillac), qui est l’organisateur du critérium de Beaulac-Bernos.

C’est un temps (le temps d’avant…), où le vélo intéresse encore les sponsors. Il est « porteur » : sport populaire et gratuit, il va vers le public.

Ce premier  « Tour de la Gironde Sud » est couru en ligne (175 km) et consacre deux figures du cyclisme régional : Michel Fedrigo est vainqueur devant Daniel Barjolin. C’est une réussite et, en 1976, l’épreuve sert de support au championnat d’Aquitaine (1er P. Audeguil), Hervé Bidou (le fils aîné) se classe 13ème derrière les Fedrigo, Barjolin, Bazzo, Jourdan…etc.  Et, 1977 voit le succès de D. Barjolin.

 

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 A ses débuts, cela s'appelle "Tour de la Gironde Sud". Les premiers vainqueurs sortent du riche vivier régional : ici, Daniel Barjolin en 1977. Le micro, derrière lui, est tenu par Roger Lanzac.

 

 

Entraînés par le succès grandissant de cette organisation et solidement appuyés sur la structure du club, les coureurs de l’U.S. Villenave grandissent et, en 1978, l’équipe junior composée par J.C. Ballion, P. Bidou, A. Chardavoine et P. Robertou cumule les titres de championne d’Aquitaine et de France sur piste (à l’exception de Chardavoine remplacé par Pandelé pour ce dernier titre), dans l’épreuve de poursuite olympique.

 

 

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 Les 4 "olympiens" de l'US Villenave et de la poursuite par équipe, champions d'Aquitaine (juniors) en 1978 

 

 

François sait bien tout ce que ces succès doivent à l’action de Jacky Lafranque, dont il ne manque pas de souligner le « gros dévouement », malgré « son air grognont et son sale caractère ».

 

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 Jacky Lafranque,  le technicien, l'entraîneur, le "maître" de l'Ecole de cyclisme de l'US Villenave, l'alter-ego de François Bidou.      Madame Lafranque      fut, de son côté, secrétaire puis trésorière du club de 1983 à 2004.  

 

 

Mais, le club – à l’image de sa remarquable « Ecole de vélo » - se veut essentiellement formateur. Se défiant des surenchères financières, il ne retient ni n’attire les « mercenaires » (dixit François B.).

 

 

  . le « Tour de Gironde »

 

 

A partir de 1978, le « Tour de Gironde » se dispute par étapes. Il y a trois étapes pour cette édition remportée par C. Jourdan devant J.J. Szkolnik et R. Bajan. Soit un trio régional très représentatif aussi au plan national.

Aujourd’hui, l’épreuve est internationale (depuis 1995) et elle fait partie de l’UCI Europe Tour. Elle est ouverte aux équipes continentales professionnelles françaises, aux équipes continentales UCI, à des équipes nationales et aux équipes régionales ou de club « avec des coureurs de 1ère catégorie seuls ».

En 2014, le Tour de Gironde (en 5 étapes) remporté par un Hollandais, R. Te Brake, a fêté sa 40ème édition. Au début des années 2000, l’épreuve compte 5 étapes (2001-2004), puis elle « redescend » à 4 étapes (2005-2009) et à 3 étapes (2010-11-12 et…15). Cela dépend du soutien des entreprises, de la force du partenariat et… des dimensions du département de la Gironde.

Un temps, les « patrons » de « Casino » semblent attirés par un Tour  d’Aquitaine, en rapport avec leurs différents magasins de Marmande, Lons, Anglet… D’autres projets ont émergé comme celui porté par G. Duclos-Lassalle, dans lequel chaque département abritait une étape. Evidemment, la région peut avoir la « nostalgie » du Tour du Sud-Ouest (1923-1952) ou du Grand Prix (ou circuit) des Vins de la Gironde (1949-1952) ou, encore, du Circuit d’Aquitaine, d’abord nommé « circuit des marchés de la volaille de Valence d’Agen (1954-1964). Mais, François Bidou le dit très simplement : « j’ai senti que ça me dépassait… » et ce n’eut pas été « raisonnable ».

Aujourd’hui, le Tour de Gironde fonctionne sur un budget de 100 000 €, dont 35 000 vont à l’hébergement, 20 000 pour les prix aux coureurs et aux équipes, le reste pour les signaleurs, les motards et la gendarmerie (10 000 €). Peut-être la dernière course a en bénéficier : « la seule où je mets du bleu ! » déclare le commandant de gendarmerie qui met à disposition : une voiture, un capitaine et huit motards.

Une épreuve qui, en 40 éditions, n’a pas connu de gros accident et, pourtant, le Président du comité d’organisaition n’ignore pas ce risque… « un jour ou l’autre …"

Le choix des parcours est guidé par le « relationnel » et quelques habitudes : toujours Cenon le samedi et, le dimanche, l’arrivée sur le boulevard des Pyrénées.

Arrivée Tour de Gironde 2005.jpg

 Un dimanche après-midi, à la fin du mois de mai, c'est l'arrivée sur l'avenue des Pyrénées à Villenave d'Ornon.  La dernière course (?) à oser pénétrer ainsi dans la "CUB"… (ici,  Saïd Haddou léve les bras en 2005).

 

  

Reconnue en Préfecture (c’est vital), la course est en étroite relation avec la DRE (pour les travaux et les déviations). Plus de 200 contrats sont passé avec les communes pour les autorisations de passage. C’est encore «  le produit d’une coopération ». Seul dans ce domaine peut-être, le « Tour des écureuils » à Beaulac-Bernos « tient encore la route ».

Cette année 2015, il y a moins de sponsors, donc plus que 3 étapes. Mais, le Conseil général qui a, partout, baissé ses subventions, maintient celle attribuée au Tour de Gironde.

C’est, enfin, 25 équipes de 6 coureurs chacune, logées à Artigues, à la maison de la promotion sociale et dans les hôtels autour. Le soir, tout le monde s’y retrouve…

 

 . Une « grande » équipe de bénévoles :

 

Les chiffres du budget, des dotations et des coûts d’organisation ne disent pas tout. Il y a d’abord une « grande équipe de bénévoles », environ une soixantaine. Pour la plupart, ils sont fidèles depuis les débuts. C’est à ce niveau que le Tour de Gironde puise les forces de sa constance : il y a ceux qui tracent le parcours, ceux qui installent l’arrivée, assurent les différentes cérémonies… ceux qui conduisent les voitures, ceux qui opèrent les différentes assistances (technique, médicale, administrative…).

Autour de François Bidou reste encore le couple Bresson (Paule qui résoud l’épineux problème de l’hébergement et Jean-Pierre , présent depuis 1974), alors que s’affirment quelques « jeunes » cadres : H. Marladot, B. Olivier, D. Tiffon, B. Minvielle, P. Saint-Martin.

L’ensemble fonctionne aussi à partir de moments de convivialité. Un temps, il y eut même une caravane publicitaire de 42 véhicules. Au temps de Jean Ghidone.

 

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 Jean Ghidone, une autre figure de ces hommes qui ont - jusqu'au bout -  aimé, pratiqué, servi le vélo : regardez dans ces yeux et sur ce visage  - et malgré l'âge - cette lueur d'amusement… enfantin ?

 

 

 . Et d’autres manifestations :

 

Symbole de réussite, l’organisation du Tour de Gironde a entraîné l’US Villenave et ses dirigeants dans d’autres animations et d’autres manifestations :

 - dans le cadre d’échanges avec l’Allemagne, une équipe d’Aquitaine dirigée par J. Lafranque a pris part à la Ronde de Munich, dont le vainqueur fut Dominique Delort.

 

J. Lafranque et l'équipe de Guyenne.jpg

       de gauche à droite : Paoletti, Debiard, D. Delort, Bach et J. Lafranque.

 

 - l’ équipe marocaine Asmar est venue en stage dans la région et elle a été reçue et hebergée, puis elle a rendu la pareille en retour à Marrakech.

 - une semblable relation s’est nouée avec l’organisateur du Trophée Joachim Agostinho au Portugal.

Cette capacité à organiser, à mobiliser des gens : « tout vient du Tour de Gironde ! » (F. Bidou). Mais, encore : championnat de France sur piste, championnat du monde sur piste, championnat du monde handisport…

Comment est né le Grand Prix de l’Humanité ? Alors qu’ils cherchaient une salle dans Bordeaux pour se réunir avec les copains du Parti (PCF), J. Chaban-Delmas fit cette réponse : « pourquoi pas au Stadium ? » D’où l’idée de faire venir quelques coureurs et une chance, la première année, la présence de Michaël Hübner, le champion du monde allemand.

Depuis, les conditions financières se sont élevées : le plateau coûte de plus en plus cher, bien que les « pistards » soient moins « chers » que les « routiers ». La prochaine édition aura lieu entre le 17 et le 24 octobre prochains, mais elle doit s’adapter à la nouvelle présence du spectacle des Girondins, désormais dans leur « nouveau stade ».

 

 

 

 . François BIDOU :

 

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 François Bidou, 84 ans, façonné par la "culture ouvrière", militant, organisateur, rassembleur… et, encore, de "bonne humeur".

 

 

. une courte carrière cycliste : 

 

 

François est né en août 1931 dans une famille qui, pendant la guerre, vivait au Bouscat. Après s’être cassé le nez en jouant au rugby, il débute à 19 ans dans le cyclisme, en prenant une licence au C.C. Bruges et sur un vélo d’occasion acheté chez Charles Lesbats. Sa première course à Paloumey (entre le Pian et Ludon) il la fait en sandales. Cependant, il monte en 3ème catégorie après une victoire dans le G.Px. de l’ASPTT qui finit au Pont-de-la-Maye, arrivant du Bouscaut. Et, la même année, il est classé 1er ex-aequo avec Delpont lors du championnat de son club. Pas très bon finisseur (« je me croyais pas bon au sprint »), les premières courses dans le Médoc, où il n’y a pas de côtes, ne lui permettent pas vraiment de s’exprimer, alors qu’il est plutôt « grimpeur ». Il se rappelle avoir fini 3ème d’un G.P. de Lestiac, au cours duquel il fallait monter 6 fois le « Pied du château » et où il fait quatre fois la prime en haut, avant d’être rattrapé par deux autres coureurs. Il se rappelle aussi son retour à la maison en vélo avec la caisse de six bouteilles, qu’il avait gagnée, sur le guidon…

 

 

F. Bidou et le CC Brugeais.jpg

 Détail qui ne trompe pas : F. Bidou a extrait cette "petite" coupure (de journal) de son portefeuille pour nous la confier...

 

 

Il a encore le souvenir d’une 7ème place au G.Px. du CCB à Bègles, gagné par Manfé devant Soubiran, après que Gérard Virol, qui l’accompagnait, n’ait pu garder sa roue dans les derniers kilomètres. Puis, lui revient aussi une arrivée du Tour de France à Bordeaux-Lescure, où, pour la réunion d’attente, avec le seul vélo de piste du club, il se classe 3ème de l’élimination.

 

 . la « Faculté de La Bastide » :

 

François a fréquenté plusieurs « écoles ». Après son CAP de chaudronnerie, il a fait une 4ème année pour devenir « maître-ouvrier ». puis, il est entré à l’Ecole d’Apprentis de la SNCF , devenu cheminot, il a fini comme « conducteur ».

Il évoque alors le contact et la fréquentation de quelques personnes qui l’ont impressionné et « marqué à vie », dit-il. Il cite les noms de Duhourquet ( René, cheminot, communiste, déporté à Dachau, maire de Bègles (1945-1971), dont le fils, Serge, lieutenant FTP a été fusillé le 1er août 1944 au camp de Souge, et Rossignol (Simone, résistante et femme pionnière en politique, puis maire de Bègles de 1971 à 1984).

 

 . « engagé » :

A l’occasion d’un colloque organisé à Villenave d’Ornon, François Bidou déclare : « Bien veillir, c’est garder un rôle citoyen » (Sud-Ouest, le 08/09/2011). A cette date, François a 80 ans passés et, pour fêter cela, le « président fondateur de l’USVC » a parcouru 80 kilomètres à vélo. A Villenave d’Ornon où il vit depuis 1962, il a, aussi, été le président de « LSR » = Loisirs-Solidarité-Retraite (aujourd’hui, la présidente est Mme M.L. Garosi). « L’engagement, c’est une autre façon de bien vieillir ».

Mais, celui qui siège au conseil des Sages (les anciens élus municipaux réunis autour du maire P. Pujol) a derrière lui une impressionnante série d’engagements : 30 ans aux parents d’élèves, 30 ans au syndicat et 40 ans au Parti (communiste français).

Donc, militant syndical (CGT cheminot), militant et candidat communiste (n°2 de C. Barande aux municipales de 1977, étiquette « Union de la Gauche »), puis adjoint au maire (18 ans adjoint aux sports), conseiller communautaire, François Bidou est encore le président de l’OMS (Office Municipal des Sports, 38 ans) et c’est dans son bureau, dont le siège est au gymnase « Nelson Paillou » au Pont-de-la-Maye, que nous l’avons rencontré. A bientôt 84 ans, il fournit la preuve qu’  « il est bon pour l’estime de soi, de montrer qu’on n’a pas traversé la vie pour rien ».  

 

 

 

Une du tour de gironde.jpg

  

Palmarès  du Tour de Gironde  (1975 - 2014)

 

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La lecture de ce palmarès peut faire émerger trois périodes :

- de 1975 à 1990 : le recrutement des vainqueurs est presqu'essentiellement  régional, avec l'apparitiion de quelques "Parisiens" (Lauraire, Morio) ou Breton (Le Goff).

- de 1990 à 1998 : de plus en plus de vainqueurs venus d'autres comités (JF. Anti - L. Desbiens - D. Leproux - F. Morelle - JP. Duracka - JP. Locatelli)

- de 1999 à 2014 : les premiers vainqueurs d'un Tour de Gironde qui s'internationalise (Zaïkov, 1993 - Bodrogi, 1999 - Larrinaga 2013), avec une sorte de renouvellement de la "tradition hollandaise" à Bordeaux (Van de Lijke, 2012 et Te Brake, 2014), précédant l'arrivée des Belges (?) (Allegaert, 2° en 2013 et Rickaert, 3° en 2014)

D'un autre point de vue, il est possible de relever parmi les coureurs présents sur le podium plusieurs futurs (ou ex-) professionnels, sans pour autant que ceux-ci soient forcément promis à "d'énormes carrières", dans cette catégorie.
Côté sentimental,  on note aussi - dans la catégorie "père-fils" - les noms de : Urbain Felix, 3° en 1980 et Urbain Alexandre, vainqueur en 2003. Tout comme : (prés de chez nous)… Daniel Pandelé, 3° en 1987 et Sylvain, vainqueur d'étape en 2012. Ainsi, JJ. Szkolnik, 2° en 1987 et son fils, Mickaël , 2 étapes en 2008.

Et, encore, les "efforts" de Gilles Dubois : surprenant vainqueur en 1989, puis 2° en 1992 et 3° en 1993. La constance de René Bajan : 3° en 1978 et 1979, encore 2° en 1983...

 



31/03/2015
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